21 septembre 1822
Les Quatre Sergents de La Rochelle
Le 21 septembre 1822, quatre sergents du 45e régiment de ligne
basé à La Rochelle sont guillotinés à Paris, en place de Grève. Leur
crime est d'appartenir à la
Charbonnerie, une organisation qui fait profession de comploter contre le régime.
On conspire faute de pouvoir voter...
Depuis l'exil de Napoléon 1er à Sainte-Hélène et la restauration du vieux roi
Louis XVIII,
les quelques milliers de bourgeois autorisés à voter se partagent entre
les ultra-royalistes et les nostalgiques de la Révolution ou de
l'Empire.
Comme la loi électorale empêche les libéraux de se faire entendre
au Parlement, ces derniers complotent dans des organisations secrètes.
La plus importante est la
Charbonnerie. Créée par des étudiants, elle emprunte son nom aux
«carbonari» napolitains, une organisation similaire née sous l'occupation française !
L'organisation se donne pour objectif l'élection d'une Assemblée
Constituante destinée à restaurer la souveraineté populaire. Mais ses
revendications laissent la masse du peuple indifférente. Depuis la chute
de Napoléon 1er, les Français, dans leur majorité, aspirent à vivre en
paix et se désintéressent des jeux politiques de la bourgeoisie.
Parmi les membres de la Charbonnerie figurent des savants
illustres comme Edgar Quinet, Augustin Thierry ou Victor Cousin, des
officiers
demi-soldes de l'armée impériale que la paix a
réduits à l'inactivité, des républicains sincères ou encore de jeunes
militaires qui rongent leur frein comme les sergents de La Rochelle.
Le populaire
marquis de Lafayette, ancien député entré dans l'opposition libérale, en fait partie. Le prince
Louis-Napoléon Bonaparte, futur empereur Napoléon III, est lui-même un temps affilié à la branche italienne.
Les
Charbonniers sont surtout présents dans les villes de garnison. Ils sont constitués en groupes de vingt hommes, les
«ventes particulières», qui suivent les instructions des
«ventes centrales», eux-mêmes subordonnés à des
«hautes ventes» dont nul ne connaît l'identité (on pense à La Fayette !).
Au nombre de 10.000 à 40.000, les militants de la Charbonnerie ne
menacent pas sérieusement le régime comme le montre l'échec de leurs
tentatives de soulèvement à Belfort et à Colmar. A Saumur, un général,
Berton, tente d'entraîner la garnison. Il est arrêté et, à l'instant
d'être guillotiné, crie
«Vive la Liberté !» La police du gouvernement Villèle met cependant tout en oeuvre pour
lutter contre l'organisation secrète. Elle arrête un sergent dénommé
Bories, qui a imprudemment parlé dans une diligence. Il est jugé avec
ses amis, également sergents, Goubin, Pommier et Raoulx.
Leur mort courageuse émeut l'opinion publique, indignée par
l'excessive sévérité du tribunal. Les journaux libéraux dénoncent le
sort fait à de simples militants. Les jeunes artistes des débuts du
romantisme s'enivrent des témoignages d'amitié et d'altruisme offerts
par ces martyrs.
De multiples lithographies vont nourrir la légende des Quatre Sergents de La Rochelle jusqu'à la révolution des
«Trois Glorieuses» (27-28-29 juillet 1830) qui remplacera la dynastie des Bourbons par... celle des Orléans (Louis-Philippe 1er).
Fabienne Manière.
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